À Phnom Penh, défendre les habitants des bidonvilles

Chapô
À Phnom Penh, la capitale cambodgienne, les maisons en tôle des quartiers les plus pauvres souffrent de la saison des pluies et de la mauvaise gestion des déchets. STT, partenaire du Secours Catholique, travaille à améliorer les conditions de vie des habitants de ces bidonvilles et les forme à défendre leurs droits fonciers.
Image
Dans un bidonville de Phnom Penh
Heure ou date
9H
Description

Le quartier Satrey Khlahan est situé au bord de la rivière Tonle Sap, au nord de Phnom Penh. Ici, STT a récemment rénové neuf maisons avec des matériaux de meilleure qualité et celles-ci comptent désormais deux étages. « Avant, nous n’avions qu’une seule pièce pour les 16 membres de ma famille. Et il pleuvait dans la maison lors de la saison humide. Je me sens mieux protégée avec cette nouvelle maison », affirme Chaïptel. Lorsque la rivière déborde, les habitants se déplacent sur des radeaux de polystyrène.

Image
Dans un bidonville de Phnom Penh
Heure ou date
10H
Description

À Prek Takong 3, les maisons des habitants sont coincées en contrebas de grands immeubles d'où descendent les eaux usées. Le bidonville, en effet, n’est pas relié au réseau d’assainissement de la ville. « Jusqu’ici, on devait marcher sur une rivière de déchets dans notre quartier, et on tombait malades », témoigne Chan Sothary, une habitante. L’an dernier, STT a fait construire un pont de bois de 50 m pour pouvoir circuler d’une maison à l’autre. « Ce pont a amélioré nos vies, se réjouit Chan Sothary. C’est plus sûr pour nos enfants et on se retrouve plus facilement dessus pour parler entre voisins. »

Image de couverture
Chan Sothary
Fichier son
Description
Avant le pont, nous devions marcher dans l'eau pleine de déchets

Écouter Chan Sothary, une habitante de Prek Takong 3

Image
Dans un bidonville de Phnom Penh
Heure ou date
11H
Description

Afin de sensibiliser à un environnement propre, STT forme les communautés au nettoyage et à la gestion des déchets, et distribue balais, gants et poubelles. « Maintenant nous pouvons marcher sur le chemin, avant c’était rempli de détritus. Notre environnement s’est amélioré et c’est plus propre », se félicite Sok Chanthy, petite commerçante du quartier de Prek Takong 60. Ce bidonville, qui n’est pas relié au réseau d’adduction d’eau de la ville, est menacé car il est situé juste à côté de grands immeubles en construction. Un mur sépare ce nouveau quartier du bidonville. Ici aussi, STT a rénové les maisons pour faire face aux inondations.

Image
Dans un bidonville de Phnom Penh
Description

Pong Ro Senchey est un quartier lui aussi situé entre deux zones privées et délimité par un mur. À la saison des pluies, l’eau empêchait les habitants de rejoindre leurs maisons. STT a là encore fait construire un pont à l’entrée du quartier. Récemment, les autorités ont invité les 450 habitants du quartier à partir. STT sensibilise ces derniers à leurs droits fonciers et leur explique comment obtenir leurs titres de propriété. « Je ne veux pas partir parce qu’ici, c’est ma maison ! Je ne suis pas loin du centre où je nettoie des toilettes. Nous avons besoin de rester ici pour gagner de quoi vivre », explique Thaï Channa (ci-contre), leader de la communauté.

Image de couverture
Thaï Channa
Fichier son
Description
Je ne veux pas partir d'ici, c'est notre maison.

 

Écouter Thaï Channa, leader de la communauté.

Image
Dans un bidonville de Phnom Penh
Heure ou date
14H
Description

Direction Samrong Tbong, près du lac Boeung Tamok. Les habitants sont menacés d’expulsion car les autorités ont décidé d’assécher le lac pour étendre un quartier d’affaires. L’après-midi, STT vient former une trentaine de membres de la communauté aux droits fonciers. Ensemble, l'ONG et les habitants ont établi une carte foncière de leurs habitations, mené plusieurs pétitions et même organisé des manifestations. Brak Sophen ne décolère pas : « J’habite ici depuis vingt ans, je ne veux pas partir : pourquoi le lac est-il pour les riches et pas pour les pauvres ? C’est injuste. »

Image
Dans un bidonville de Phnom Penh
Description

Les habitants de Samrong Tbong vivent exclusivement de la pêche sur le lac. Les autorités ont numéroté les maisons appelées à être détruites. Elles ont proposé une solution de relogement située à plusieurs kilomètres de distance. Une vingtaine de familles, sur la centaine que compte la communauté, ont accepté. « Je refuse cette compensation car le nouvel endroit n’est pas desservi en eau ni en électricité, et il est loin des écoles », s’insurge Sokom, une habitante.

Image
Dans un bidonville de Phnom Penh
Description

Selon STT et des données officielles gouvernementales, près de 70 % du lac de Boeung Tamok (soit 2 300 ha) a déjà été rempli de sable et de cailloux. C’est la politique actuelle : étendre la ville et vendre la terre à des investisseurs souvent étrangers. D’autres lacs de Phnom Penh ont ainsi déjà été comblés et ont vu naître des quartiers d’affaires avec villas de luxe et grands centres commerciaux. Chaque fois, les plus pauvres sont ainsi repoussés en dehors de la ville. Cette politique, d’ailleurs, aggrave les inondations, car sans lacs pour la recevoir, l’eau des pluies envahit la ville.

Image
Dans un bidonville de Phnom Penh
Heure ou date
16H
Description

En plus de la formation aux droits fonciers dispensée à chaque communauté, STT organise régulièrement des réunions entre les leaders des quartiers afin de faciliter le partage d’expérience et de bonnes pratiques. Ce jour-là, STT attire leur attention sur l’importance de la sécurité digitale, notamment sur les réseaux sociaux. « Nous prenons ensemble conscience de nos droits et échangeons sur nos combats », témoigne Horn Bros, de la communauté Stoeng Kombot. « Aujourd’hui nous avons appris que la communauté Sbov a obtenu le titre foncier, ça nous donne de l’espoir. » Rendez-vous est pris trois mois plus tard pour faire le point sur leurs luttes respectives.

Texte SEO

« Les pauvres ne devraient pas être exclus du développement »

Par Saran Soeung, directeur exécutif de STT (Sahmakum Teang Tnaut) 

« Aujourd’hui, au Cambodge, le développement des grandes villes comme Phnom Penh se fait au seul bénéfice des riches. Les grandes entreprises qui ont de l’argent deviennent propriétaires de terres où vivaient auparavant les plus pauvres. À STT, nous pensons que les communautés pauvres doivent avoir accès au droit foncier comme tous les autres et qu’il ne faut pas les exclure du développement. Aujourd’hui, au nom de la politique de développement, les pauvres sont repoussés en dehors de la ville, parfois à 40 km de leurs maisons. Et les compensations proposées ne sont pas justes : les infrastructures et les services publics comme les écoles manquent dans ces secteurs. L’insécurité foncière des plus pauvres est un défi, au Cambodge, de même que leurs conditions de vie. Dans les communautés, les maisons des plus pauvres ne sont pas solides, ces derniers vivent près des routes, sans accès à l’eau ni à l’électricité, et ils souffrent de problèmes de santé dus à un environnement sale et pollué. À STT, nous travaillons avec une quarantaine de communautés pour les aider à acquérir des connaissances et des compétences afin qu’elles revendiquent elles-mêmes leurs droits. STT adresse aussi des recommandations aux autorités pour que le développement prenne en compte les plus pauvres. »

 

Crédits
Nom(s)
Cécile Leclerc-Laurent
Fonction(s)
Journaliste rédactrice
Nom(s)
Élodie Perriot
Fonction(s)
Photographe
Pour rester informé(e)
je m'abonne à la newsletter
Titre mode liste
À Phnom Penh, défendre les habitants des bidonvilles