À Toulouse, « il y avait et il y a encore urgence »

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Chapô
Pendant la crise sanitaire, le Secours Catholique de Toulouse poursuit ses actions auprès des gens de la rue, particulièrement vulnérables au virus et victimes du confinement. Avec des moyens augmentés et de nouveaux bénévoles, les tournées de rue et le petit-déjeuner solidaire quotidien ont continué.
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La vitrine de l'Ostalada.
Heure ou date
6H45
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Sur la place Arnaud-Bernard endormie, une seule vitrine est éclairée, une seule porte ouverte, celle de l’Ostalada, le local d’accueil du Secours Catholique de Toulouse. Depuis le confinement, décrété trois semaines auparavant, le lieu n’est plus ouvert au public. Seuls les bénévoles s’activent désormais à l’intérieur. À leur tête, Andrew Nguyen gère le pôle Errance. Ce mercredi, il est présent depuis 5h30 du matin. Il faut préparer le café et charger les colis destinés au petit-déjeuner solidaire. Comme chaque jour, dans le quartier du Raisin, une petite dizaine de sans-abri attendent ce moment.

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Enrico accueille avec une bouteille de gel hydroalcoolique.
Heure ou date
7H
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À l’écart du centre-ville, derrière la gare Matabiau, Enrico interroge ses compagnons bénévoles. « On peut y aller », lance-t-il, tandis que, dans le crépuscule, les premiers sans-abri approchent lentement. Un par un, Enrico les accueille avec une bouteille de gel hydroalcoolique. Derrière une table, Patrick, Agnès et Boris leur distribuent du café chaud, du lait et un repas complet pour la journée. La sortie s’effectue par une autre porte, pour limiter les contacts. « Avant, ici, c’était très convivial. Maintenant, avec les mesures d’hygiène, c’est un peu différent », souffle Enrico derrière son masque. 

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Un bénévole sert un café à un accueilli.
Heure ou date
8H
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Un café à la main, Pierre, 26 ans, raconte son histoire. Intérimaire chez Amazon, sa mission a été interrompue. Dans l’incapacité de payer son loyer, il a été expulsé et il vit depuis une semaine dans la rue. « Le Secours Catholique m’a donné un duvet. Heureusement qu’il y a des distributions comme celle-là, dit-il. Le Covid 19 ? Je n’en ai pas peur. J’ai même espéré en avoir les symptômes pour être hospitalisé, au chaud. » Plus loin, Johann, 40 ans dont 8 dans la rue, exprime sa révolte : « Beaucoup de structures de douche ont fermé. Des hébergements aussi. Nous sommes des victimes collatérales du coronavirus. »

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Préparation de repas.
Heure ou date
14H30
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À l’Ostalada, autour d’Andrew et de Marc Beauvais, président de la délégation Ariège-Garonne, dix bénévoles – des femmes, des hommes, “accueillis” ou bénévoles traditionnels – préparent des colis pour la tournée du soir. La nourriture vient de la Banque alimentaire et d’invendus de commerçants. Comme d’habitude, Sébastien, le chef cuisinier, a mis les petits plats dans les grands. Au menu : « deux fruits, deux yaourts, un sandwich, une boisson, une viennoiserie, une salade : thon, cœur de palmier, tomate, jus de citron, un soupçon de vinaigre de cerise et de la mayonnaise », énumère-t-il.

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L'archevêque de Toulouse et un bénévole.
Heure ou date
15H
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Beaucoup l’attendaient. Masque sur le visage, Mgr Le Gall, archevêque de Toulouse, est venu « manifester son soutien ». Pendant près d’une heure, il discute avec les bénévoles. Parmi eux, Corinne, la cinquantaine, chef d’entreprise, donne pour la première fois un coup de main au Secours Catholique. « J’ai décidé d’y consacrer deux heures par semaine. En cette période, c’est important de penser à nos plus fragiles. Avec le confinement, la fin de la mendicité, leur situation s’est aggravée. Et il fallait prendre le relais des bénévoles qui les suivent d’habitude, souvent âgés et donc à risque. »

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Brahim et Pablo en tournée dans les rues d'Avignon.
Heure ou date
19H
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Chargé des colis, le véhicule utilitaire traverse la ville déserte. Ce soir, c’est Brahim et Pablo qui assurent la tournée. Derrière l’Oncopôle, premier arrêt. Au milieu des gravats et déchets en tout genre, vivent 30 adultes et 15 enfants. « Ici, c’est le camp des Serbes ! » annonce en souriant Stefanovitch, l’un des hommes du groupe. Brahim et Pablo distribuent sandwichs et couches. Ils prennent aussi le temps de discuter. « C’est difficile, confie Stefanovitch, on ne peut plus sortir ni travailler. »

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Suite de la tournée dans les rues.
Description

Brahim, bénévole depuis deux ans, roule vers le centre-ville tandis que Pablo, étudiant en psycho, prend note des signalements du 115. La feuille se remplit. Il y a beaucoup de familles, beaucoup d’enfants (durant la soirée, le binôme visitera 20 hommes, 23 femmes et 40 enfants). Près de la place Dupuy, nouvel arrêt devant un lieu où vivent quatre familles d’origine arménienne ou tchétchène. Une mère sort avec son bébé. « Je commence toujours par les familles. Ça permet de voir les enfants. Parfois, je leur donne un doudou », raconte Brahim, qui prend dans le véhicule une peluche fabriquée par des étudiants.

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Les bénévoles poursuivent leur tournée de nuit, à la lampe torche.
Heure ou date
21H30
Description

Le vent est glacial sur les bords de la Garonne. Merry, Myki et Amélia vivent dans un camion. Pieds nus malgré le froid, Myki est en colère. À cause du coronavirus, beaucoup de points d’eau sont fermés. Pour cuisiner, il doit puiser parfois dans le fleuve. « La manche ? C’est mission impossible. En quatre heures, j’ai gagné 6 euros », déplore-t-il. Sa compagne est enceinte de deux mois. Brahim appelle Médecins du monde qui travaille en binôme avec le Secours Catholique. Ils passeront ensuite. Quant à Brahim et Pablo, ils poursuivront leur tournée jusqu’à minuit.

Crédits
Nom(s)
Axel Puig
Fonction(s)
Journaliste rédacteur
Nom(s)
Guillaume Rivière
Fonction(s)
Photographe
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