Au Mali, l’agroécologie pour faire face à la sécheresse

Chapô
Depuis quinze ans, Caritas Bamako, soutenue par le Secours Catholique-Caritas France, aide les populations à s'adapter au changement climatique. Reportage à Guihoyo, une commune située à 120 km au nord de la capitale malienne.
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« Si nous ne faisons rien, le Sahara va descendre jusqu'à nous », répète Alphonse devant une foule de villageois attentifs, installés sous l’arbre à palabres du village. « Il faut arrêter les feux de brousse pour protéger nos terres et nos animaux. Sans herbe, que vont manger nos bêtes ? Et sans bêtes, de quoi vivrons-nous ? » Portant une blouse bleue sur laquelle on peut lire « Protection de l'environnement pour tous » en bambara, la langue locale, Alphonse est l'un des sept brigadiers de Guihoyo chargés de faire respecter une convention locale signée en 2010 par les maires de la région sous l'impulsion de Caritas. Feux de brousse, coupe de bois et fabrication de charbon sont depuis soumis à des régimes d'exploitation stricts. Des couloirs de transhumance pour les élevages ont aussi été créés. Les brigadiers sensibilisent les populations à cette convention, surveillent les environs grâce à leurs vélos et signalent les contrevenants aux chefs de villages. « Grâce à la mise en place des brigades, la forêt a recommencé à fleurir », se réjouit Massama Diarra, maire de Guihoyo.

Pour Caritas Bamako, il devenait urgent de sensibiliser à la protection de l'environnement en raison du changement climatique. « Depuis plusieurs années, nous constatons au Mali un déficit pluviométrique et un rétrécissement des terres cultivables. Cela accroît la pauvreté déjà importante dans le monde rural », souligne Ferdinand Sissoko, chargé de programme à Caritas Bamako. « Je pense que ceux qui n'arriveront pas à s'adapter aux changements climatiques vont mourir », poursuit l'abbé Noël Samaké, coordinateur.

À la sortie du village, Caritas a fait construire une digue qui favorise la remontée des eaux des nappes phréatiques et permet d'alimenter toute l'année les puits d'un périmètre maraîcher installé juste à côté. Cinquante-quatre femmes y travaillent. Cette installation a permis non seulement de diversifier leur alimentation et de lutter contre la malnutrition, mais aussi d'améliorer leur revenu. Diouraba y cultive des concombres, des salades et des aubergines : « Grâce au maraîchage, je peux acheter des habits à mes enfants et assurer leurs besoins. » En moyenne, chaque femme gagne ainsi 82 180 francs CFA (126 euros) par semestre. Caritas a aussi encouragé la création d'une organisation paysanne agricole (OPA). Cette coopérative financée par les femmes achète des semences améliorées, plus résistantes à la sécheresse. « Cette OPA permet d'engager une réflexion ensemble pour le bien de la communauté », commente Ferdinand.

Au maraîchage le matin, les femmes aident leur mari aux champs l'après-midi. C'est le cas de Soungoura, femme de Kassoum. Grâce à Caritas, ce dernier a pu mettre en place des techniques de restauration des sols telles que des cordons pierreux installés autour de ses champs et qui permettent à l'eau de s'infiltrer, ou encore la fumure organique, qui refertilise une terre sèche et dénudée. L'idée est d'éviter tout engrais chimique. « Lorsque je cultive mon mil, je mets de côté les tiges pour faire de la fumure avec les excréments de mes bœufs. Ainsi, j'ai chaque année une bonne production et une bonne qualité de céréales », explique Kassoum. Actuellement, vingt-quatre villages sont aidés par Caritas Bamako. Preuve du succès de l'agroécologie, de plus en plus de villages environnants sollicitent l'ONG pour être accompagnés.

Crédits
Nom(s)
Cécile Leclerc-Laurent
Fonction(s)
Journaliste rédactrice
Nom(s)
Xavier Schwebel
Fonction(s)
Photographe
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