Épi’soleil : la solidarité en circuit court

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Dans la Vallée de la Meuse, une épicerie solidaire itinérante, lancée par le Secours catholique, propose exclusivement des produits frais et locaux.
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À Épi'soleil, ce sont les adhérents et adhérentes qui gèrent les commandes et la caisse. Évelyne et Tiphanie apprécient de pouvoir s'impliquer dans le fonctionnement de l'épicerie.

Un chou rouge, une laitue, du fromage blanc, deux pots de crème fraîche artisanale, du beurre, des œufs, des pommes, des poires, une botte de radis… Le tout pour 10,90 euros. À l’étage de la Maison des solidarités de Bogny-sur-Meuse, Véronique règle la commande qu’elle vient de récupérer dans le camion siglé Epi’Soleil garé devant le bâtiment. 

« Ce sont des bons produits beaucoup moins chers qu’en grande surface », apprécie-t-elle. « Cela me permet d’accéder à certaines choses que je ne pourrai pas acheter sinon, en tout cas pas de la même qualité et pas dans les mêmes quantités », précise la quinquagénaire, allocataire du RSA.

Depuis trois ans, l’épicerie itinérante du Secours Catholique se rend chaque semaine à Bogny-sur-Meuse, Monthermé et Deville, trois villages de la Vallée de la Meuse. Ici, comme ailleurs, le confinement a mis en lumière la situation d’isolement de nombreuses personnes précaires, souvent liée à des difficultés de mobilité, éloignées des lieux de socialisation et des commerces alimentaires. 

Nous sommes complémentaires des Restos du cœur.

L’idée d’Épi’soleil est née de ce double constat de précarité alimentaire et relationnelle, avec pour objectifs principaux de créer ou recréer du lien et donner accès aux personnes à une alimentation digne et durable. 

Ouverte à tous, mais proposant des tarifs variables selon les revenus, l’épicerie solidaire ne propose ni invendus de supermarché ni produits donnés par la banque alimentaire. « Nous sommes complémentaires des Restos du cœur », explique Pascal Adrian, animatrice au Secours Catholique local, tout en tenant à préciser : « Nous avons aussi des adhérents précaires, des petits-retraités notamment, qui sont non-éligibles à l’aide alimentaire, du fait de revenus jugés trop élevés, et qui pourtant, une fois leurs frais fixes payés, ont un "reste pour vivre" qui ne leur permet pas de s’en sortir. » 

Groupement d'achat

Le commerce mobile s’approvisionne auprès d’une dizaine de fournisseurs : un primeur régional et des producteurs locaux de crème, yaourts et formage blanc, de fromage de chèvre, d’œufs, de farine, de pommes et de poires, de courges et de champignons… Et fonctionne comme un groupement d’achat. Une semaine sur deux, chaque « client » passe commande des produits et des quantités qu’il souhaite. Et la semaine suivante, c’est la livraison.

Pour Pascale Adrian, partir des envies et besoins exprimés par les adhérents de l’épicerie revêt un double intérêt : « Cela évite le gaspillage et cela redonne du pouvoir d’agir à des personnes en leur proposant de choisir leur alimentation. »
 

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Ruben, 23 ans, a connu l’épicerie par le biais de l’association Familles rurales. Lui qui a toujours mangé « frais » - « Dans ma famille, ça s’est transmis de génération en génération », dit-il – apprécie cette offre « centralisée ».  Surtout pour les personnes âgées, dont sa grand-mère. « Beaucoup d’entre elles ont du mal à se déplacer, constate le jeune homme en jogging mauve. Là, elles n’ont plus besoin de faire des kilomètres pour aller chercher les produits dans les fermes, elles y ont accès au cœur du village. » Assistante maternelle à la retraite, Nathalie apprécie également. « Il n’y a pas de commerce dans le secteur qui vend des produits locaux, regrette-t-elle. Pour trouver une coopérative de producteurs, il faut aller à Charleville-Mézières. Ça fait loin. »

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©Steven Wassenaar / Secours catholique
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Ingrid, 42 ans, a été séduite par le choix de l'épicerie de fonctionner en circuit court. « Je ne suis pas une écolo à fond, mais je fais attention, dit-elle. Je sais que consommer des produits locaux, ça pollue moins. » Pour elle, s'approvisionner à Épi'soleil est aussi une manière de soutenir « des producteurs qui par leurs pratiques sont dans le respect du produit et de la nature ». Cette mère de quatre enfant, allocataire du RSA, a toujours eu cette préoccupation d'une alimentation saine et durable - « J'ai été élevée comme ça » -, mais sans pour autant pouvoir satisfaire cette envie, car « en magasin, ce type de produits, ça coûte souvent un bras », observe-t-elle.

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Pour Véronique, 54 ans, consommer des légumes frais, c'est une question de goût, mais aussi et surtout de santé. « Je suis malade, ma médecin et ma pharmacienne m’ont conseillé d'éviter les plats cuisinés en boîte ou surgelés, trop gras, sucrés et salés », explique cette femme seule qui vit du RSA. Les tarifs réduits d’Épi’soleil lui permettent de suivre ces recommandations.  « Des boîtes, il m’arrive toujours d’en manger, précise-t-elle. Mais moins qu'avant. Je cuisine beaucoup plus. » Ce qu’elle aime surtout préparer, ce sont les « plats familiaux comme les gratins, les soupes ou le pot-au-feu ». 

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©Steven Wassenaar / Secours catholique
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L’intérêt du groupement d’achat est de pouvoir choisir, estime Cédric, 25 ans, ouvrier intérimaire dans une usine de fabrication de plafonds. Cette semaine, il a essentiellement commandé du beurre, des œufs et de la crème fraîche. Les légumes ? « Ça dépend des saisons et de ce que j’ai envie de manger », sourit-il. Il prend souvent des pommes de terre et des laitues. Il apprécie particulièrement les concombres et les tomates, l’été. En revanche, l'automne, « les courges, c’est moins mon truc », confie-t-il. 

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À Épi'soleil, Maryse, 78 ans, a découvert le butternut, la courge spaghetti, le radis noir... « Au moins, je ne mourrai pas idiote en n'ayant mangé que des patates et des poireaux », plaisante-t-elle. Entre adhérents et adhérentes, on échange des recettes. Maryse apprécie cette "initiation" à de nouveaux goûts, de nouvelles manières de cuisiner.  Elle apprécie également les rencontres qu'a permises l'épicerie. « Des personnes que je n’aurais jamais rencontrées sinon, car nous ne sommes pas de la même génération, explique la retraitée. On n’a pas forcément les mêmes points de vue et modes de vie, mais c’est enrichissant. » Si Christine, 55 ans, vient depuis deux ans à Épi’soleil, c’est justement pour « voir du monde ». Ce rendez-vous hebdomadaire la dynamise. Et elle constate un effet positif sur son moral. « Cela peut paraître pas grand-chose, mais rien que le fait de discuter, de rigoler, de partager un gâteau et du café, on revit un peu », confie cette femme, bénéficiaire de l’allocation aux adultes handicapés, qui vit seule depuis son divorce. 

 

Crédits
Nom(s)
Benjamin Sèze
Fonction(s)
journaliste
Nom(s)
Steven Wassenaar
Fonction(s)
photographe
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