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Le départ "caché" des jeunes Ivoiriens de Koonan

Migration : les départs « cachés » des jeunes de Koonan

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Chapô
Le phénomène a explosé ces dernières années. À Koonan, village reculé de Côte d’Ivoire, situé à 800 km de la capitale, Abidjan, de plus en plus de jeunes partent « à l’aventure ». Ils ont généralement entre 20 ans et 25 ans, et, la plupart du temps, quittent le pays à l’insu de leurs parents. Loin d’être une lubie, ce choix est stratégique. Ces jeunes conçoivent souvent la migration comme un « accélérateur » de vie.
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L'endroit se situe à la sortie de la ville, juste avant que les sentiers boueux ne se perdent dans la forêt et les herbes hautes. C’est un regroupement d’une dizaine de cases. L’habitat est modeste et exigu. Les murs sont façonnés avec de la terre et coiffés de toits d’herbe séchée.

À l’intérieur sont empilées des bassines en plastique pour laver le linge et la vaisselle. Dans la cour, des cendres encore fumantes laissent deviner l’emplacement d’un feu de bois où l’on a fait cuire l’attiéké, une semoule de manioc qui constitue, avec le riz, la base de l’alimentation locale.

Nous sommes à Koonan, dans l’extrême nord-ouest de la Côte d’Ivoire, à vingt minutes en moto de la Guinée. Vu de ce village de 6 000 habitants, Abidjan, le poumon économique du pays, est un mirage lointain.

C’est ici qu’Oumar Kone est revenu vivre il y a quatre mois, un an après avoir quitté son pays direction l’Europe. Le jeune homme de 20 ans avait mûri son projet depuis l’enfance. « J’avais le goût de l’aventure, envie d’aller voir ailleurs pour avoir un lendemain meilleur, explique-t-il. Et puis nous sommes nombreux, sept enfants, il fallait que l’un d’entre nous cherche quelque chose pour assumer la charge de la famille. »

Il fallait que l’un d’entre nous cherche quelque chose pour assumer la charge de la famille.
Oumar Kone, 20 ans.

Alors Oumar est « parti à l’aventure », comme de nombreux jeunes de son âge dans les environs. Difficile de donner une évaluation précise. Il existe peu de statistiques détaillées sur l’importance et l’évolution de l’émigration ivoirienne. « C’est encore un phénomène relativement récent, mais il prend de l’ampleur depuis la décennie de troubles qui ont secoué le pays », notent les auteurs d’une enquête publiée en 2017 par l’OCDE et le Cires.

La plupart des émigrants ont entre 20 et 30 ans, mais dans certains cas, ils n’ont même pas 18 ans. Les plus jeunes accompagnent parfois un frère plus âgé, mais ils partent aussi seuls.

À Koonan, « pas une seule famille n’échappe à la migration », indique le maire de la ville, Abou Bamba, pour donner une idée de l’ampleur du phénomène. Son propre fils, âgé de 22 ans, est récemment parti au Maroc.
 

« Pourquoi pas moi ? »

Assis à l’ombre de l’apatam, Siafa Bamba est le chef coutumier du village. Vêtu d’une longue tunique orange et coiffé d’un calot blanc, l’homme âgé de 75 ans raconte qu’autrefois, les départs de jeunes existaient déjà mais restaient rares. « C’était des étudiants, des jeunes des grandes villes, surtout d’Abidjan, qui partaient en avion avec un visa », précise-t-il.

L’instauration de la scolarisation de masse, après l’indépendance du pays, et le manque de débouchés à la sortie des études, ont créé une première génération d’émigrants vers la France. Ceux-ci ont réussi et ont pu aider leurs parents au village. « Ils reviennent désormais pour les cérémonies et les vacances avec leurs belles voitures. Ils font construire de belles maisons. En voyant cela, les jeunes d’ici se disent : “Pourquoi pas moi ?” »
 

Lamine, lauréat du Brevet des collège, à Koonan. Côte d'Ivoire
Lamine, 18 ans, (au premier plan) vient de recevoir les résultats du BEPC. Il fait partie des 29% d'admis en Côte d'Ivoire en 2022. 
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Le jour où il a pris le bus en direction du Mali, première étape de son périple, Oumar vivait à San Pedro, une ville du sud de la Côte d’Ivoire, chez un ami de la famille. Il y était mécanicien dans un garage automobile.

Son père et son frère aîné étaient au courant de son projet, mais pas sa mère. « Cela aurait été un choc pour elle de savoir que je partais de façon clandestine, dit-il. Sa santé est fragile, elle ne l’aurait pas supporté. »

Si certaines familles organisent ou soutiennent financièrement la migration de leur enfant, la plupart des jeunes préparent leur départ à l’insu de leurs parents. Dans un rapport publié en 2020, faisant suite à une enquête menée auprès de migrants ivoiriens, l’OIM Côte d’Ivoire révèle que 94 % des hommes interviewés ont pris seuls la décision de migrer, et que les deux tiers ont financé eux-mêmes leur voyage.

J’ai tout imaginé : que mon fils avait eu un accident de moto, qu’il s’était fait enlever...
Diomandé Massain, agricultrice.

Au bout de deux jours sans nouvelles de Falikou, son fils, Diomandé Massain, agricultrice à Koonan, a commencé à s’inquiéter. C’était il y a un an et demi. « Son téléphone ne répondait plus », relate cette femme âgée de 54 ans. Elle s’est alors renseignée et a appris que son fils n’était plus à Touba, le chef-lieu de la région, où il préparait son bac. Son silence a duré une semaine.

« J’en ai été malade, raconte la mère de famille. J’ai tout imaginé : qu’il avait eu un accident de moto, qu’il s’était fait enlever... » À aucun moment elle n’a pensé à un départ. « Pour voyager il faut de l’argent et il n’en avait pas, alors je n’y ai pas pensé. » Falikou avait économisé en faisant le taxi-moto durant ses années de lycée.

Si son fils lui avait parlé de son projet, Diomandé lui aurait dit : « Ton papa est décédé, j’ai besoin de toi ici. Et puis, on n’a pas les moyens de te payer le voyage. Le billet d’avion et le passeport coûtent cher. »

Péril méditerranéen

Pour elle, comme pour la plupart des familles rencontrées à Koonan et dans ses environs, le “voyage”, ne s’envisage pas autrement que par les airs. La voie clandestine est proscrite. En effet, rapporté par les informations télévisées, le péril méditerranéen qui se dresse devant les jeunes Ivoiriens en route pour l’Europe est source d’angoisse pour leurs proches. Pour Diomandé, ce danger est extrêmement concret. L’an dernier, Abou, son neveu, est mort noyé en tentant la traversée. En évoquant ce jeune de 27 ans qui était mécanicien à Touba, ses yeux se brouillent de larmes.

Aujourd’hui, Falikou est en Algérie. Il fait des petits contrats dans le bâtiment pour financer la suite de son parcours. Sa mère est inquiète. « Je lui dis de ne pas passer par l’eau, d’attendre d’avoir assez d’argent pour prendre l’avion... Mais il me répond seulement de prier pour lui. » Alors Diomandé se lève la nuit pour prier afin que Dieu protège son fils.
 

Diomande Massain, agricultrice à Koonan en Côte d'Ivoire.
Diomande Massain, agricultrice, émue en repensant à son neveu péri en mer Méditerranée.
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L’agricultrice n’est pas opposée à la migration. Si le projet de Falikou réussit et que celui-ci peut lui envoyer de l’argent, cela lui permettra de faire construire une maison plus solide, convient-elle, en montrant les fissures qui lézardent les murs de la pièce où elle nous reçoit, « avec un vrai plafond, une douche... ».

Elle pourra aussi monter un petit commerce de condiments au marché, et ne plus avoir besoin d’aller aux champs où seul son dernier fils, scolarisé en CE2, peut l’aider. « Ce que je récolte ne vaut même pas le repas. Je n’arrive plus à bien travailler », déplore-t-elle en nous montrant son pied droit enflé et en évoquant ses douleurs aux genoux.

Face au départ de leurs jeunes, les familles sont souvent tiraillées. D’un côté, la nécessité d’une main-d’œuvre dans les champs, l’envie de garder leurs enfants auprès d’elles et la peur des risques mortels encourus durant le parcours migratoire. De l’autre, la perspective d’une amélioration de leurs conditions de vie grâce à l’argent gagné « derrière l’eau ».

Avant que mon fils ne me fasse construire une maison, je vivais dans une case.
Siafa Bamba, chef du village.

Parti en 2015 par la voie clandestine, sans l’accord de son père, le fils de Siafa Bamba, le chef du village, travaille aujourd’hui en Espagne comme couturier, et y a obtenu des papiers. Avec l’argent qu’il a envoyé à son père, ce dernier a pu faire construire une maison en béton, couverte d’un toit en tôle. « Auparavant, je vivais dans une case », précise le “vieux”.

Une telle réussite nourrit légitimement des velléités de départ chez les jeunes du voisinage, qui veulent offrir la même aide à leurs parents. Malheureusement, pour beaucoup, l’entreprise ne connaît pas le même succès.

Une impasse

Parti il y a six ans, à l’âge de 20 ans, également sans le consentement de ses parents, Amara, le fils de Zoumana Diabaté, un agriculteur de Koonan, n’a pu envoyer qu’à deux reprises 50 000 francs CFA (environ 75 euros) depuis l’Espagne. C’était en 2019, après trois années de galère à dormir « dans des baraques de fortune juste couvertes de plastique », décrit son père.

À cette époque, Zoumana a même dû vendre son champ d’anacardiers, la principale source de revenu des paysans de la région, et s’endetter pour envoyer 300 000 francs CFA (environ 460 euros) à Amara, afin « qu’il puisse s’acheter des vêtements chauds et vivre ».

Depuis 2019, le vieil agriculteur n’a plus rien reçu de son fils. Et depuis plus d’un an, il n’arrive pas à le joindre. « Je me pose plein de questions, confie-t-il. Pourquoi ne donne-t-il plus de nouvelles ? Est-ce qu’il est en vie ? En bonne santé ? »
 

Mohamed Maninga à Koonan, Côte d'Ivoire migration
Assis au stand de sa soeur, au marché, Mohamed Maninga (à gauche), âgé 17 ans, est fan de rap français. Il rêve de devenir rappeur en France.
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La plupart des jeunes qui partent de Koonan et de ses environs ne passent même pas la Méditerranée, bloqués en Algérie, au Maroc ou en Libye, faute de moyens pour payer la traversée.

Ceux qui parviennent à envoyer un peu d’argent à leur famille sont rares. Et ne pouvant effectuer de transfert de fonds, du fait de l’impossibilité d’ouvrir un compte bancaire, ils dépendent d’intermédiaires qui se servent largement quand ils ne les escroquent pas.

Les jeunes se retrouvent alors dans une impasse, sans possibilité d’avancer, et tout retour en arrière est exclu. « Si tu es parti et que tu reviens au village sans ramener de moyens, c’est la honte », explique Zoumana Diabaté.

Si tu es parti et que tu reviens au village sans ramener de moyens, c’est la honte.
Zoumana Diabaté, agriculteur.

C’est en partie pour cela, et aussi pour tout ce qu’il avait enduré pour arriver jusqu’en Europe, qu’Amara, le fils du vieil agriculteur, a refusé de revenir au pays lorsque son père, le voyant en plein désespoir en Espagne, le lui a suggéré. « Il m’a répondu : “Pas sans avoir quelque chose pour améliorer votre situation.” »

Ceux qui reviennent ont souvent connu le sort d’Oumar Koune, arrêté par les gendarmes algériens lors d’une opération d’arrestation massive de migrants subsahariens et expulsé dans le désert, à la frontière nigérienne.

Une balle dans la tête

À Soula, un petit village voisin de Koonan, Seckou Bayoko répare la moto tricycle avec laquelle il « (fait) le chauffeur ». Sur ses cinq amis qui ont migré, un seul est arrivé en Europe, grâce au soutien financier de sa famille. Le dernier parti est toujours en Algérie. Les trois autres en ont été expulsés il y a un an.

Seckou les a revus. Ils lui ont raconté les violences subies tout au long du parcours. « Ils se sont fait frapper par les passeurs, racketter par des brigands..., relate le jeune homme. Ils ont même vu un homme qui ne pouvait pas payer les braqueurs se faire descendre d’une balle dans la tête, au Niger. »

Dans le rapport de l’OIM Côte d’Ivoire, près de deux migrants sur trois déclarent avoir été victimes d’abus, de violence ou d’exploitation au cours de leur voyage. Dans le désert malien, c’est un groupe de djihadistes qui a dépouillé Oumar Kone et ses compagnons de route. « J’ai eu très peur », confie le jeune homme âgé de 20 ans.

Mon père m’a dit qu’il préférait que je reste à côté de lui pour l’épauler.
Seckou Bayoko, 27 ans.

Refroidi par l’expérience de ses copains du village, Seckou Bayoko, lui, s’est laissé convaincre par son père de ne pas migrer à son tour. « Il a réalisé que si mes amis partaient, peut- être que moi aussi je nourrissais ce projet, raconte le jeune homme. Il m’a fait asseoir et on a discuté. Mes frères et sœurs sont encore petits, il m’a dit qu’il préférait que je reste à côté de lui pour l’épauler, qu’on avait un moulin à farine de manioc à gérer, et que si je faisais en plus le taxi-moto, on pourrait s’en sortir. »

La plupart des familles n’ont pas d’autre alternative à proposer à leurs jeunes que le travail aux champs. Un dur labeur où tout se fait à la main, à coups de pioche et de machette. « C’est très pénible et pas rentable », reconnaît le chef du village de Koonan, Siafa Bamba. « On oblige nos enfants à le faire car on a besoin d’eux, mais on ne leur souhaite pas de souffrir comme nous. »
 

Doumbia, 16 ans, remplit des jerricans d'eau pour fabriquer du pesticide pour les champs de son père.
Doumbia, 16 ans, remplit des jerricans d'eau pour fabriquer du pesticide pour les champs de son père.
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Assis devant la case qu’il partage avec sa femme et leur jeune fils, Moussa Kone, 27 ans, a fait le calcul. Le jeune agriculteur vit de la noix de cajou. Sa récolte annuelle lui permet de remplir dix sacs de 100 kg. Selon le prix fixé par l’État, cela lui rapporte entre 300 000 et 350 000 francs CFA par an (par comparaison, le Smic annuel ivoirien est de 720 000 francs CFA). « Avec cela, tu dois traiter le champ et nourrir ta famille... Pas facile d’économiser. »

Moussa voudrait acheter un terrain et construire une maison. Un chantier qu’il estime à 8 millions de francs CFA. Pour le réaliser, il faudrait qu’il multiplie sa production presque par dix, considère-t-il. Ce qui suppose qu’il ait suffisamment d’argent pour financer les intrants chimiques et une machine agricole... Comment faire ?

Même si mes amis galèrent en espagne et qu’ils sont mal payés, le peu qu’ils gagnent là-bas, quand ils l’envoient en Côte d’Ivoire, ça fait beaucoup.
Moussa Kone, 27 ans.

Ces deux dernières années, Moussa a vu des amis partir vers l’Europe. « Pour certains, ça a marché », constate-t-il. Sur les réseaux sociaux, le jeune agriculteur regarde les photos que ces derniers postent depuis l’Espagne, sur lesquelles ils portent de beaux habits. Il ne se fait pas d’illusion pour autant : « Ils te font croire qu’ils ont la belle vie, mais toi tu comprends qu’ils travaillent dans les champs de tomates. »

Néanmoins, poursuit-il, « même s’ils galèrent et qu’ils sont mal payés, même si on peut penser que, finalement, ils font la même chose qu’ici, ce n’est pas pareil. Car le peu qu’ils gagnent là-bas, quand ils l’envoient en Côte d’Ivoire, ça fait beaucoup. » Certains ont d’ailleurs déjà commencé à envoyer de l’argent pour construire et pour acheter des bœufs à leurs parents.

« Partir, c’est un accélérateur pour progresser dans la vie, estime Moussa. Ici, à 27 ans, j’ai l’impression d’avoir un frein à main qui m’empêche d’avancer. » Son plan : « Travailler deux ou trois ans en Europe pour pouvoir réaliser quelque chose au village. »
 

Moussa Kone avec sa femme et son oncle.
Moussa Kone, agriculteur de 27 ans, avec sa femme, Bassa, et son oncle, Vasse.
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La nuit est tombée à Koonan. Comme tous les soirs, quelques hommes du voisinage se retrouvent dans la cour où vit Moussa pour « le grain », un moment d’échange informel où l’on débat de tout et où parfois se règlent quelques différends.

Doumbia Moriba, un jeune voisin, prépare le thé. L’adolescent de 16 ans est félicité par l’assemblée. Il fait partie des rares lauréats du BEPC cette année (37 % de réussite à Koonan, 29 % au niveau national). Branché sur France 24 et les sites d’informations, le jeune homme aime discuter de foot et de politique française.

Ce fils d’agriculteur, qui a perdu sa mère l’an dernier, nourrit un projet bien précis : s’installer à Caen, où vit un ami à lui qui a réussi le voyage, pour y faire des études. « Je travaillerai le week-end et pendant les congés, prévoit-il. Ainsi, je pourrai m’autofinancer et envoyer de l’argent à mon père. »

En France, je travaillerai le week-end et pendant les congés pour m’autofinancer et envoyer de l’argent à mon père.
Doumbia Moriba, 16 ans.

Il ne compte pas s’en aller tout de suite. Il se laisse quatre ans pour passer son bac et économiser de quoi payer le voyage. « En France, le niveau de diplôme est important. Et puis, à 20 ans, je serai plus mature, estime-t-il, on me fera plus confiance pour me donner un job. »

Doumbia est conscient des risques que représente la migration et il s’attend à un parcours « un peu difficile ». Est-il prêt à prendre un bateau pour traverser la Méditerranée ? « Je ne suis pas “prêt” », rectifie l’adolescent en souriant poliment. « Je suis “obligé”. »

Repartir

Installé sur une chaise un peu en retrait, Oumar Kone écoute silencieusement. Depuis qu’il est revenu au village, le jeune homme est là, sans vraiment l’être. Il est arrivé épuisé physiquement et psychologiquement. Mais désormais reposé, il compte repartir, dès qu’il en aura les moyens... Par la même route.

Pour la plupart des jeunes, affirme Moussa, « les morts dans le désert ou la mer n’enlèvent pas l’envie de partir. Car tant qu’il y en a qui réussissent, même si huit sur dix échouent, on se dit : “Moi, je peux y arriver.” »

Crédits
Nom(s)
Benjamin Sèze
Fonction(s)
Journaliste
Nom(s)
Vincent Boisot
Fonction(s)
Photographe
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