« La situation humaine en Haïti est effroyable »

Chapô
Depuis l’assassinat du président Jovenel Moïse en juillet 2021, les Haïtiens constatent la déliquescence de leur pays, livré à des gangs armés qui pillent, kidnappent, violent, incendient et tuent en toute impunité. L’ONU a décidé le 2 octobre dernier d’envoyer une force d’intervention multinationale pour rétablir l’ordre et faire cesser le chaos dont se font l’écho Virginie Pochon et David Tilus, membres dirigeants du Groupe d’action francophone pour l’environnement (Gafe), un des partenaires du Secours Catholique en Haïti.  
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Après l’assassinat du dernier président, la situation sécuritaire en Haïti – qui était déjà mal en point – n’a fait qu’empirer jusqu’à sombrer dans le chaos. « La situation est catastrophique, résume le directeur exécutif du Groupe d'action francophone pour l'environnement (Gafe), David Tilus. Il n’y a plus de pouvoir politique, plus d’État, plus d’accompagnement social. Les institutions publiques sont dysfonctionnelles. Un terreau propice aux gangs, concentrés dans la zone métropolitaine, qui coupent le pays en trois grands blocs géographiques. Il n’est désormais plus possible de circuler librement. »

« Les jeunes ne peuvent pas étudier dans des conditions normales. Comment apprendre dans la peur ? », indique Virginie Pochon, responsable de projets au Gafe. Cette Française, sédentarisée en Haïti, constate l’effondrement. « Aujourd’hui la détresse économique est si terrible qu’une partie de la jeunesse s’oriente vers les gangs parce que c’est de l’argent facile et que le travail se fait rare ou précaire. »

Les gangs se disputent des territoires dans des conflits meurtriers. Ils n’hésitent plus à expulser les habitants de “zones stratégiques“, en mettant le feu à leurs maisons. « Les gens fuient ces quartiers et affluent sur d’autres territoires, créant de nouvelles situations conflictuelles et toujours plus de précarité. La situation humaine en Haïti est effroyable », déplore Virginie Pochon. Les gangs profitent d’une totale impunité. « Nous connaissons tous des personnes tuées, violées ou délogées par ces gangs ». 

Sentiment d'impuissance

Le nombre de sollicitations à leur association ne fait que croître. Mais le Gafe n’a pas les moyens de répondre, aussi bien « moralement, physiquement et financièrement. » Virginie Pochon parle également de son « terrible sentiment d’impuissance et de (sa) colère envers la communauté internationale qui, par son appui au gouvernement, isole les citoyens et des organisations de la société civile haïtienne qui veulent (re)construire la démocratie. »

Dans ce contexte, le Secours Catholique - Caritas France maintient son appui à des partenaires de la société civile haïtienne, qui comme le GAFE, misent sur des processus de transformation sociale de long terme, centrés sur l’éducation à la citoyenneté et à l’écologie, la sécurité alimentaire et l’agroécologie. « Notre association  envisage un nouvel axe de travail autour de l’appui psychosocial, notamment auprès des enfants, précise Aude Hadley, responsable du Pôle Amérique latine et Caraïbes au Secours Catholique. C’est un sujet délicat, et complexe mais qui semble incontournable dans le contexte actuel de violence ».

Crédits
Nom(s)
Jacques Duffaut
Fonction(s)
Journaliste
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