Rapport du GIEC : « lutter contre le changement climatique, c’est lutter contre la pauvreté »

Chapô
Ce 8 octobre, le GIEC (Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat) publie un rapport sur les impacts que pourrait avoir un réchauffement des températures de 1,5 °C par rapport à l'époque pré-industrielle.

Le groupe d'experts a aussi imaginé des scénarios possibles pour rester en dessous de ce seuil. Un message d’espoir pour le Secours Catholique, même si tout reste à faire.
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Texte
RAPPORT DU GIEC : « LUTTER CONTRE LE CHANGEMENT CLIMATIQUE, C’EST LUTTER CONTRE LA PAUVRETÉ »

 

 

Sara LickelDÉCRYPTAGE AVEC Sara Lickel, chargée de plaidoyer international au secours catholique.

 

Secours Catholique : Que faut-il retenir du rapport rendu ce lundi 8 octobre par les experts du GIEC ?

Sara Lickel : C’est clairement montré par le GIEC : les impacts d’un réchauffement climatique à 1,5 °C sont moins importants pour les populations vulnérables que ceux d’un réchauffement à 2 °C. Le niveau des océans monterait de 10 cm de moins, la biodiversité serait mieux conservée…

Tout cela assure une meilleure sécurité alimentaire donc moins de pauvreté. Des études montrent que 55 millions de personnes échapperont à la faim en Afrique si on limite le réchauffement à 1,5 °C plutôt qu’à 2 °C. 

Le GIEC apporte donc un message d’espoir en préconisant d’atteindre cet objectif de 1,5 °C. Mais pour cela, encore faut-il des actions politiques fortes et une mise en œuvre rapide et ambitieuse de l’accord de Paris adoptée à la COP21 en 2015. Car les engagements actuels mènent un réchauffement de plus de 3 °C.


S.C : Quelles seraient les solutions pour atteindre cet objectif de 1,5 °C ?

S.L : Pour la première fois, le GIEC préconise un changement de mode de consommation ou de production. Il reconnaît ainsi le potentiel, en terme de réduction des émissions de gaz à effet de serre, de politiques publiques qui mettraient en route la transition écologique. Et c'est une bonne chose.

A contrario, certaines solutions évoquées dans le rapport nous paraissent mauvaises. Par exemple, la séquestration du carbone dans les sols agricoles. D’une part, elle va détourner des milliers d’hectares de terres de la production alimentaire. D’autre part, cela nous détourne du fait que la vraie nécessité est le changement de modèle. Cette nécessité, le GIEC la reconnaît pour la première fois.

Nous préconisons aussi le respect du droit à la terre des peuples autochtones qui résident dans des forêts. Bien gérées, elles sont de véritables "puits de carbone".


Pour notre part, nous prônons la sortie des énergies fossiles et une transition vers 100 % d’énergies renouvelables. Nous préconisons aussi le respect du droit à la terre des peuples autochtones qui résident dans des forêts qui, bien gérées, sont de véritables « puits de carbone ».

Enfin, partant du constat que le circuit de production alimentaire du champ à l’assiette (des pesticides à l’emballage, en passant par le transport) émet un tiers des gaz à effet de serre, nous défendons une transformation des systèmes alimentaires vers un système agroécologique.

Soutenir la transition agroécologique nous paraît indispensable, et nous le réaffirmons dans un rapport destiné aux décideurs politiques. La transition agroécologique présente plusieurs avantages. Elle est peu émettrice de gaz à effet de serre, elle permet aux paysans de mieux s’adapter aux évolutions climatiques, et elle est créatrice d’emplois car permet de reterritorialiser des systèmes de production alimentaire et énergétique.


S.C : Il est donc possible d’allier lutte contre le changement climatique et lutte contre la pauvreté…

S.L : Oui, le lien est évident : on ne peut pas lutter contre le changement climatique sans lutter contre la pauvreté et vice versa. Car le changement climatique affecte les plus pauvres.

C’est ici la première fois, dans ce rapport, que le GIEC reconnait le lien entre l’éradication de la pauvreté (l’un des objectifs du développement durable) et le changement climatique.


S.C : La COP24 se tiendra début décembre à Katowice, en Pologne. A-t-on l’espoir de voir les chefs d’État et de gouvernement tenir compte de ce rapport ?

S.L : Ce rapport va, en tout cas, être discuté. Et on espère qu’il va inciter les États à rehausser leurs engagements qui, aujourd’hui, mènent à un réchauffement de plus de 3 °C. On attend aussi de la COP24 que les États définissent les règles d’application de L’accord de Paris. La COP24 va déterminer si oui ou non, cet accord est mis en œuvre.

Les grands principes du préambule de l’accord de Paris doivent être retranscrits dans les règles d’application, comme des lignes rouges à ne pas franchir.


Avec Caritas Internationalis, nous serons présents pour réaliser un travail de plaidoyer. Nous craignons que les règles d’application de l'accord, finalement décidées par les États, soient faibles et vagues, et non respectueuses des droits humains. 

Nous souhaitons que les grands principes du préambule de L’accord de Paris (droits de l’homme, sécurité alimentaire, droits des peuples autochtones,…) soient retranscrits dans les règles d’application, comme des lignes rouges à ne pas franchir par les politiques climatiques.

Par exemple, certaines solutions de séquestration du carbone menacent clairement le droit la terre. Pour nous, les droits humains restent une priorité. Car sauver la planète c’est aussi sauver les hommes.

Crédits
Nom(s)
CÉCILE LECLERC-LAURENT
Nom(s)
Crédits photos: © Lionel Charrier - M.Y.O.P./Secours Catholique, ©Élodie Perriot/ Secours Catholique
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