Accompagnement à la scolarité : « On n'est pas seulement là pour aider aux devoirs »
Au local du Secours Catholique de Sartrouville, dans le quartier populaire du Plateau, Rayan, élève de CM1, révise sa leçon de géographie avec le soutien de Valérie, bénévole, et enseignante de profession. « Au fil des séances, les enfants prennent peu à peu conscience de l'intérêt de travailler, explique cette dernière. Ils planifient leurs devoirs, font preuve d'une meilleure concentration. Ainsi, Rayan apporte désormais ses devoirs du jeudi à faire le mercredi. Il les oubliait très souvent au début. »
À côté de ce premier binôme, Mohamed et Marie-Anne sont également au travail. Mohamed est le petit frère de Rayan. Marie-Anne l'accompagne depuis deux ans. « On adapte les apprentissages en prenant connaissance des méthodes enseignées par la maîtresse, indique la bénévole. Et on invite l'enfant à s'exprimer sur son ressenti : est-ce qu’il va bien ? Est-ce qu’il se sent bien ? » Marie-Anne souligne également l'intérêt d'un accompagnement individualisé, et non en groupe. « Les mamans se sentent en confiance par la relation privilégiée qu'elles ont avec nous, elles se confient sur leurs problèmes du quotidien ou leurs difficultés plus personnelles. »
Le jeune Nima arrive à sa séance avec une heure d’avance. Il raconte qu’il vivait auparavant à six dans un deux-pièces, et qu'il a récemment déménagé dans un quatre-pièces. « C'est mieux », souligne le garçon qui s'emploie à situer sur une carte son pays d'origine, le Mali. Ninon, la bénévole qui l'accompagne, arrive à 13h30. Avant de démarrer la séance proprement dite, elle lui propose une activité ludique de pliage de cocotte en papier. Puis à 14h, le binôme travaille l'orthographe, à partir d'une liste de mots fournie par l'école, avant de s'exercer à la conjugaison des verbes à l’imparfait.
Pendant ce temps, la jeune Manon s’occupe de Boubou, au naturel plus remuant et moins enclin à se mettre au travail. Manon est la fille de Séverine, bénévole référente de l'équipe d'accompagnement scolaire. À 19 ans, la jeune bachelière se destine à des études d'auxiliaire de puériculture. C’est elle qui a demandé à sa mère si elle accepterait qu'elle rejoigne le Secours Catholique, alors en recherche de bénévoles.
Après chaque séance de travail d'environ une heure, place à une demi-heure de jeu, souvent collaboratif pour éviter les compétitions et les tensions. « Le jeu nous a semblé être un levier pour nourrir la confiance, pour que l’enfant se sente fort et puisse développer ses compétences », explique Véronique, responsable du Secours Catholique de Sartrouville. Le jeu peut en effet permettre de déceler des potentialités et des talents chez les enfants (une aptitude particulière pour le dessin par exemple). Par ce biais, ces derniers développent par ailleurs un autre rapport à l’adulte, au « sachant ».
Tous les bénévoles de l'équipe se réunissent pour le bilan trimestriel, afin d'échanger sur les méthodes d'apprentissage ou pour se transmettre des informations concernant les enfants qu'ils accompagnent. Un bilan annuel est également mené avec la famille et l’enfant. Les parents sont le maillon entre l'école et le Secours Catholique. L'équipe tient à ce que les bénévoles n'aient pas de contact direct avec les professeurs, dans l'objectif d'affirmer l’implication des parents dans le suivi de la scolarité de leurs enfants. La mère de Rayan et de Mohammed a connu le dispositif d’accompagnement par l’intermédiaire de la Confédération sociale des familles. Elle constate la progression de ses enfants. Elle-même suit des cours de français dispensés par l'équipe du Secours Catholique. « Ainsi, la famille dans son ensemble progresse. Notre action s'inscrit dans une logique d’aide à la parentalité pour le bienfait de toute la famille », estime Véronique, la responsable du Secours Catholique de Sartrouville.
Parc de La Villette, un samedi de juin. C’est jour de sortie pour les enfants de l’accompagnement scolaire. Première attraction, le grand toboggan Dragon ravit tous les enfants. « Ça fait peur avant d’y aller et ensuite, ça ne fait plus peur », réagit Fatou, le sourire aux lèvres. Choisie en équipe avec les bénévoles, cette escapade parisienne est prévue depuis trois mois. Séverine explique : « Nous sommes allés au théâtre de Sartrouville en février mais cette sortie à La Villette est particulière car elle marque la fin de l’année de l’accompagnement scolaire. La priorité de la journée, c’est de faire plaisir aux enfants. Et il y aura une petite surprise à la fin. » Après plusieurs descentes en toboggan, direction le jardin des vents où les sept jeunes et leurs huit accompagnateurs profitent de la tyrolienne et de trampolines sous un ciel de plus en plus menaçant.
La météo prévoit de la pluie pour 11h. Quelques gouttes tombent. Les gardiens du jardin mettent tout le monde dehors à 10h57, au grand regret de la petite troupe. « On a faim ! » s'exclament alors les enfants dans un cri du cœur. Séverine, organisatrice de cette journée, cherche un lieu à l’abri pour le pique-nique. Ça sera sous les arbres, face au Dragon. Mohamed et Rayan, les deux frères de 7 et 9 ans, sortent leur sandwich. « Il a l’air bon. Il est composé de quoi ? » interroge Valérie. « C’est un sandwich avec des frites. C’est notre mère qui l’a préparé », répond malicieusement Rayan. Valérie confie que ce qu’elle aime dans cet accompagnement, hors du cadre scolaire, « c’est de voir une relation de confiance s’établir entre l’enfant et l’adulte. »
Retour aux jardins des vents. La pluie a cessé. Les mini trampolines attirent tout le groupe. Ismaël aime sauter et rebondir. Il réagit : « J’aime cette journée, d’autant plus qu’hier je ne savais pas que j’allais venir ». Une belle surprise pour lui. Les jeux s’enchainent. Concours de saut puis chat perché. Manon, la jeune bénévole, apprécie, elle qui aime créer du lien. « Cette sortie apporte de la joie. On peut jouer avec les enfants et voir leur bonne humeur. Les voir s’amuser, ça fait vraiment plaisir. » conclut-elle.
C’est l’heure de la visite de la Cité des enfants : six espaces différents pour découvrir des phénomènes scientifiques et techniques, tout en s’amusant. « À l’usine », Fatou découvre comment fabriquer des boîtes en carton. Dans la serre de l’espace "jardin", Nima s’émerveille des chrysalides et papillons. Mohammed fait la course avec un squelette dans l’espace "corps" puis défie la gravité avec des balles qui restent quelques secondes en suspension sur des jets d’eau. Valérie qui l’accompagne durant la visite commente : « Montrer qu’on est un accompagnant oui, mais également que l’on peut s’amuser ensemble. Les dimensions jeux, plaisir et fraternité sont importantes. On n’est pas là que pour aider aux devoirs scolaires. »
En sortant de la Cité des sciences, les enfants et leurs accompagnateurs sont ravis. Laure, retraitée de la fonction publique et bénévole depuis 2015, résume sa vision de cette sortie : « C’est l’occasion pour les enfants de jouer mais surtout de voir un autre paysage. Tout le monde n’a pas l’occasion d’aller à Paris. Sur le moment, on pense peut-être que c’est anecdotique mais après ça fait des souvenirs. » Les bénévoles ne ratent pas une occasion de susciter la curiosité des jeunes. Rodolphe, un autre bénévole, s’arrête et montre du doigt un étrange animal en contre bas. C’est un héron. Une drôle de sculpture qui attire le regard étonné des enfants. Il est temps d’annoncer la surprise : un goûter au choix pour tous offert par le Secours Catholique de Sartrouville. Glaces, gaufres, crêpes ou barbe à papa. Petits et grands se régalent. Un dernier moment de joyeux partage pour clôturer cette journée qui donnera peut-être envie aux enfants de revenir en famille.