COP 30 : « Mieux aider les pays les plus touchés à s’adapter aux changements climatiques »
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Emilie Johann, responsable du plaidoyer international au Secours Catholique.
Qu’attendre de la COP 30, qui se tient jusqu’au 21 novembre au Brésil ?
Émilie Johann : La question de la finance climat, notamment des fonds destinés à l’atténuation et l’adaptation des pays en développement, sera à l’ordre du jour. Lors de la COP 29 la communauté internationale a fixé deux objectifs financiers : un engagement à mobiliser au moins 300 milliards de dollars par an pour l’action climatique et à aller jusqu’à 1,3 trillions de dollars annuels d’ici à 2035. Cependant, le premier objectif reste en deçà des besoins de plus en plus élevés et doit encore sécuriser une partie significative pour l’adaptation et les pertes et dommages. Les États présents à la COP 30 doivent également élaborer la feuille de route pour atteindre l’objectif le plus élevé.
Ce n’est pas aux pays en développement d’assumer le coût des besoins d’adaptation à une crise climatique causées par des émissions de gaz à effet de serre dont ils ne sont pas responsables.
De notre côté, nous plaidons pour une augmentation des financements consacrés à l’adaptation mais également pour que les États s’engagent à mobiliser des fonds publics sous forme de don afin de ne pas créer de dette supplémentaire. En effet, ce n’est pas aux pays en développement d’assumer le coût des besoins d’adaptation à une crise climatique causée par des émissions de gaz à effet de serre dont ils ne sont pas responsables.
Durant la COP 30, les négociations sur le climat aborderont d’autres sujets…
E.J. : Tout à fait ! L’enjeu n’est pas que financier. La question de l’ambition climatique globale via les plans nationaux de réduction des émissions de gaz à effet de serre sera cruciale. Concernant l’adaptation, nous suivrons particulièrement la question des indicateurs – guides pour évaluer les politiques publiques et les pratiques d’adaptation des États.
Le Secours Catholique a en effet enquêté dans 14 territoires, à travers la France et le monde, et a recueilli le témoignage de plus de 150 personnes affectées par les changements climatiques pour comprendre pourquoi les personnes en précarité sont plus vulnérables à la crise climatique. Il ressort, entre autres, de cette étude, réalisée avec nos partenaires internationaux, et qui sera publiée en février prochain, que les habitants des territoires impactés par les dérèglements climatiques sont insuffisamment associés au processus de construction et de mise en œuvre des politiques d’adaptation.
Les catastrophes climatiques engendrent des traumatismes.
De notre point de vue, les solutions ne peuvent être conçues sans l’expérience et les connaissances des personnes concernées, notamment les plus précaires. Il est donc essentiel que la participation des communautés locales dans la construction des politiques et des pratiques d’adaptation figure parmi les critères d’évaluation des progrès en matière d’adaptation, discutés lors de la COP 30 à Belém. Et cela pour éviter que les indicateurs retenus ne soient trop éloignés des réalités de terrain.
Quels sont les autres défis de ce sommet mondial ?
E.J. : Les catastrophes climatiques engendrent des traumatismes. C’est le cas, par exemple, des agriculteurs affectés par l’érosion côtière ou la salinisation des sols, qui deviennent incultivables. Certains sont contraints de devoir changer de lieu d’habitation voire d’activité. C’est pour eux une remise en question de leur identité.
À la COP 27, le Fonds « pertes et dommages » a été créé pour compenser les conséquences parfois irréversibles du dérèglement climatique. L’une de nos demandes est de reconnaître les impacts psychologiques dont souffrent les personnes exposées aux changements climatiques comme une forme de perte non économique. Les projets portant sur la santé mentale des victimes de la crise climatique devraient en effet pouvoir être éligibles au Fonds « pertes et dommages », dont nous attendons encore la mise en œuvre.