Quand le vélo rassemble
Trois samedis par mois, les locaux du Secours Catholique du 38 rue des Apennins à Paris se transforment en atelier de réparation de vélos. Les membres de Vélocip’Aide sont à pied d’œuvre pour offrir une seconde vie à des bicyclettes récupérées. Un atelier solidaire et participatif.
Dérailleurs, freins, roues, cadres, guidons… : le sous-sol du local du Secours Catholique situé dans le 17e arrondissement de Paris est une vraie mine d’or pour les passionnés de vélo.
Ici, tout provient du recyclage : régulièrement, la préfecture de police de la capitale donne à Vélocip’Aide – le nom de l’atelier – des engins qu’elle récupère dans les rues de Paris. Une dizaine de bénévoles les réparent ou les démontent pour en faire des pièces détachées.
Ce samedi après-midi, ils sont sept à installer des bâches pour protéger le sol. Tous ont troqué leur chemise contre un vieux pull qui ne craint pas la graisse.
Gillou s’occupe d’un vélo rouge usagé : « Notre objectif premier, c’est de permettre à des personnes dans le besoin ou à faible budget de se procurer un vélo. Si quelqu’un a besoin d’un vélo, il vient chez nous et il en choisit un. Ensuite, on va l’aider pendant plusieurs samedis de suite à le remettre en état. »
D’autres viennent réparer leurs propres vélos et chercher des conseils. Les créateurs de Vélocip’Aide – en 2007 – sont partis du constat que certaines personnes dépendent d’un vélo pour se déplacer dans Paris. D’où l’idée de les aider à avoir un moyen de transport gratuit et solide.
L’entrée de l’atelier est libre, sans adhésion. Dans un coin de la salle, une cagnotte invite ceux qui le souhaitent à participer selon leurs moyens.
La solidarité est à la base de tout, explique Sylvain, la trentaine, responsable de l’atelier : « Toutes les catégories sociales se croisent. Vélocip’Aide permet de s’aider les uns les autres. Certains de nos visiteurs sont à la rue et savent réparer un vélo. Ça leur donne d’ailleurs une meilleure estime d’eux-mêmes. »
Autonomie
Dans un coin de la salle, Mohammed triture les rayons de la roue de son vélo. Lui, vient régulièrement pour s’occuper.
Sous traitement psychiatrique, il ne peut pas travailler : « Quand je m’ennuie, je viens. Je suis étonné car parfois je prends un vieux vélo, je me dis que je n’arriverai à rien faire, et en fin de compte, à plusieurs, on y arrive ! Je demande aux autres : montrez-moi pour que je sache faire tout seul. »
Il faut dire que tout le monde s’entraide. Gillou épaule Claire pour réparer ses freins, Guillaume encourage Lan-Ahn aux prises avec le papillon de sa roue arrière, Sylvain aide Xavier à remettre son dérailleur en place.
« Chez Vélocip’Aide, quand on n’a pas la réponse, on s’adresse aux autres et avec ce partage d’expérience, on trouve toujours la solution ! » s’exclame Gillou.
Mais l’atelier est aussi participatif : les passants sont invités à mettre les mains dans la graisse, l’objectif étant de devenir le plus autonome possible dans l’entretien de son vélo.
Hervé, la soixantaine, est bénévole depuis six ans : « On conseille, on aide, on prête les outils. Mais on ne fait pas les réparations à la place des gens. Il faut qu’ils soient acteurs, responsables de leurs propres vélos. »
Lan-Ahn, qui habite le quartier, approuve : « J’aime l’ambiance chaleureuse et l’esprit d’entraide et d’ouverture. Et puis, ça me fait aussi plaisir d’apprendre à réparer mon vélo toute seule. Ça me permet de faire du manuel. »
Lutter contre le gaspillage
Les bénévoles ont réussi à récupérer mille et un outils : tournevis, fers à souder, pinces, écrous, vis et rondelles... Vélocip’Aide dispose de tout l’outillage nécessaire pour démonter, nettoyer et remettre en état les vélos.
C’est ce qui a attiré Alexandre, venu pour réparer sa roue voilée : « Chez moi, je n’ai ni l’espace ni les outils pour réparer. Venir ici permet aussi d’avoir le petit conseil qui permet d’avancer. »
Xavier, pour sa part, apprécie le côté écologique de l’atelier : « Les pièces détachées servent à réparer d’autres vélos. On élimine ainsi les épaves et ça redonne une vie aux autres engins, c’est une très bonne idée. »
Écologique, participatif, solidaire, l’atelier Vélocip’Aide est aussi convivial. Les rires fusent et la bonne entente est de mise. « On vient aussi ici pour se rencontrer », raconte Nicola, bénévole d’origine italienne. « On a des gens de tous horizons : culture, travail... On est là pour partager quelque chose ensemble autour du vélo. J’espère que cette économie du partage sera l’avenir dans notre société. »
Dès que les beaux jours reviendront, et probablement cet été, les bénévoles envisagent d’organiser une sortie vélo tous ensemble. Histoire d’utiliser leurs bicyclettes réparées. Avec toujours cette passion du deux-roues… et de l’entraide !
